La forêt mise à nue
:Séverine Lamarque |
Une lumière d'automne. Un silence immuable. Difficile d'imaginer que la forêt de Retjons puisse un jour être le théâtre d'un vacarme routier. Pourtant, certains signes ne trompent pas. Comme le vrombissement soudain d'un moteur. Des branches craquent sous les roues d'un mastodonte mécanique. Là, au hasard d'une piste sablonneuse, on découvre une parcelle nue. Un engin au bec d'acier évacue les cadavres de pins qui jonchent le sol. Une véritable saignée forestière, dans l'intimité.
La perspective d'une voie rapide au cœur de la forêt des Petites Landes se dessine alors. Force est de constater que, malgré les polémiques, une opposition structurée et des recours déposés, les travaux dits « préparatoires » avancent. Des centaines d'arbres encombrant le passage de l'autoroute A 65 sont abattus. Des parcelles ciblées sont défrichées et soumises à des fouilles archéologiques.
Au village, seuls les plus curieux sont au fait de l'état d'avancement des travaux. Aline, retraitée, est un témoin averti du chantier. Elle se balade quotidiennement dans les bois alentours. « Ça me fait sourire de lire dans la presse que l'autoroute ne va peut-être pas se faire quand je vois tous les jours des engins défricher la forêt. Il y a beaucoup de ''on dit'', moi je me contente de voir? »
Palombières menacées. Au bar-restaurant de la commune, le projet autoroutier n'occupe pas, selon la gérante, toutes les conversations. Hormis peut-être la question des palombières qui a visiblement déchaîné les passions. Mais la gérante n'en dira pas plus?
Quatre palombières sont en effet menacées par le tracé de l'A 65 : l'une sera carrément démolie, les trois autres se situeront dans la zone des 300 mètres de l'autoroute. De quoi faire frémir la communauté rejtonnaise des nemrods qui compte une cinquantaine de membres.
« Ma palombière n'est pas concernée par le tracé mais si cela avait été le cas, je me serais certainement battu », avoue l'un d'entre eux. « Ils sont obligés d'indemniser les chasseurs lésés sinon ils vont se faire tuer ! », plaisante-t-il en se fendant d'un large sourire.
Les travaux officiels ne devraient débuter qu'au printemps prochain. Voilà qui laisse le temps aux acteurs du projet de changer leur fusil d'épaule.
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