>> Quel serait le moins onéreux ?
Sans surprise, c’est le scénario A qui serait le moins coûteux puisque l’investissement varie de 1,5 à 2,2 milliards d’euros. Il est vrai qu’il ne comprend que 50 kilomètres de nouvelles voies entre Dax et Orthez (le shunt) avant de se raccorder à l’existant. La réalisation de Mont-de-Marsan-Pau impliquerait la construction de 75 kms de voies, pour une somme allant de 1,8 à 2,6 millions.
>> Quel gain de temps entre Pau et Bordeaux ?
Le plus court reste la ligne droite. L’usager gagnera 49 minutes si le tracé direct Mont-de-Marsan-Pau est retenu. Pau-Bordeaux se ferait alors en 54 minutes. Soit dix minutes de moins que si la future voie épouse l’existant entre Orthez et Dax. Par Dax, le trajet atteindrait 1h04. La ligne le long de l’A65, qui n’a aucun supporter, permettrait de relier Pau à Bordeaux en 1h03. Quant au détour par Tarbes, il mettrait Pau à 1h23 de Bordeaux.
>> Combien de voyageurs supplémentaires avec la LGV ?
RFF se livre à des projections intéressantes. C’est la liaison directe qui remporte la palme avec 380 000 voyageurs supplémentaires à Pau, où passe déjà 1 million de voyageurs par an. Contre 300 000 (par Orthez), 350 000 (le long de l’A65) et 330 000 (par Tarbes).
>> Quelle rentabilité pour ce projet ?
Aucune. Quoi qu’il arrive, RFF (l’aménageur) et SNCF (l’exploitant) perdront de l’argent. La valeur actuelle nette (VAN), outil comptable pour mesurer la pertinence d’un projet avant d’investir, montre ainsi que, d’où qu’on arrive, cette LGV Béarn risque d’être un gouffre financier pour les deux opérateurs. Seuls les usagers y trouveront bénéfice. En ces temps de rigueur, le débat pourrait donc voir s’opposer ceux qui craignent pour les finances publiques aux partisans de l’aménagement du territoire.
>> Ces chiffres menacent-ils le projet ?
Oui. D’autant que des critiques se multiplient contre les LGV au regard de leurs coûts et leur absence de rentabilité. A ce jour, l’amélioration de la desserte Béarn-Bigorre est certes incluse dans le schéma national des transports mais inscription ne signifie pas réalisation. De plus; RFF, très occupé par ailleurs, ne fera sans doute pas un lobbying intensif pour mener à bien ce dossier.
>> Mais est-ce un projet LGV ?
A priori non. Chez RFF, comme le confirme le chargé de mission Frédéric Perriere, le terme LGV n’est jamais employé pour le Béarn et la Bigorre. Il est simplement question « d’amélioration de la desserte ferroviaire.» Une expression reprise dans le schéma national des transports, actualisé en juillet, où le projet béarnais est mentionné certes, mais jamais flanqué du sceau de la grande vitesse, contrairement à d’autres. Là aussi, on évoque une « amélioration». Dans la prose de l’administration, la LGV Béarn-Bigorre n’existe pas.
===> Cacophonie à grande vitesse en Béarn
L’union sacrée que réclamerait ce projet est loin d’être acquise. De quoi sans doute retarder la mise en œuvre de réalisation. Les élus landais ne veulent pas de nouvelles saignées.
Tant que les responsables locaux ne pousseront pas dans le même sens, on peut supposer que ni l’Etat, ni RFF ne feront du zèle pour débloquer un dossier qu’ils savent d’avance non-rentable.
Voici en tout cas les principales prises de position recensées sur ce dossier.
Scénario A (Dax-Orthez-Pau)
celui qui recueille le plus de suffrages chez les responsables locaux. Tous les élus de l’Ouest du Béarn et du centre du département veulent en effet conserver la desserte de leur territoire, via la gare d’Orthez, et ne pas être obligés d’aller prendre le TGV à Dax.
Lors des campagnes électorales de 2011, la quasi-totalité des candidats aux cantons (dont le président Georges Labazée) et au sénat, interrogés par l’association LGV-Orthez-Oui, ont dit leur préférence pour cette option.
Les élus landais, comme la maire de Mont-de-Marsan Geneviève Darrieussecq ou le sénateur Jean-Louis Carrère, qui ne veulent pas de nouvelles saignées dans leur territoire, sont également pour ce tracé.
Scénario B (Mont-de-Marsan-Pau)
Martine Lignières-Cassou plaide plutôt pour la voie directe. Tout comme la CCI Pau-Béarn. Sauf que la CCI veut elle une gare à Uzein, près de l’aéroport, alors que la maire de Pau n’envisage pas de déshabiller sa gare du centre-ville, qui reste indispensable à son projet de renouvellement urbain.
Suivant ainsi l’exemple de Dax et Bayonne qui ont refusé une nouvelle gare TGV à l’extérieur de leurs murs, préférant conserver et développer les existantes.
Scénario D (Mont-de-Marsan-Pau-Tarbes)
Le CRELOC (Comité pour la réouverture de la ligne Oloron-Canfranc) plaide ce scénario parce qu’il permettrait d’utiliser une ancienne ligne de fret, par Riscle et Maubourguet, et éviter ainsi la création d’un nouveau sillon. La voie aurait ensuite été améliorée entre Tarbes et Pau. Principaux inconvénients pour les Béarnais, Tarbes aurait été servi avant Pau et le gain de temps est maigre pour rejoindre Bordeaux. Ce ne serait plus la ligne Béarn-Bigorre mais la ligne Bigorre-Béarn.