Une bonne partie des projets de fermes photovoltaïques de la région ne verront pas le jour.
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 Une centrale photovoltaïque dans le Gers. photo Jean-Jacques saubi |
Engagée depuis trois ans dans la région, la course au photovoltaïque y fait rage. Elle prend ces temps-ci une particulière acuité. Car parmi la foule de projets solaires en gestation, seule une fraction verra sans doute le jour.
Et dans cette ruée pour produire du kilowattheure solaire au sol, les derniers venus ou les moins habiles laisseront des plumes. Car le terrain risque d'être de moins en moins favorable, au fil des années. |
La centrale solaire de Losse, dans les Landes, déjà partiellement raccordée au réseau, sera, une fois achevée, la plus importante de France, avec une superficie équivalente à 500 terrains de football, et une puissance représentant presque le dixième d'un réacteur de la centrale nucléaire de Braud-et-Saint-Louis (Gironde). Si elle voit le jour, celle de Cestas (Gironde), qui a fait l'objet d'une enquête publique au mois de juillet, aura un potentiel comparable. À une échelle sensiblement moindre, la commune gersoise de Saint-Clar accueille une des premières fermes solaires d'ampleur à avoir vu le jour sur le territoire français. Pour le seul département des Landes, 110 projets sont à l'étude ou en construction. Et l'on en compte plusieurs dizaines en Gironde. La région, et plus particulièrement le massif forestier gascon, fait l'objet, depuis trois ans, d'une véritable ruée des opérateurs. Le plus important d'entre eux, EDF Énergies nouvelles, a 30 dossiers en cours d'élaboration pour le seul département des Landes.
Grands espaces pas chers
L'Aquitaine n'est pourtant pas la région la plus ensoleillée de France. Mais elle a la particularité de disposer de vastes espaces non urbanisés où le coût du foncier est nettement plus bas que dans le Midi. La fièvre du photovoltaïque, déclenchée depuis 2006-2007 par la mise en place de tarifs de rachat particulièrement avantageux du kilowattheure solaire, s'y est donc manifestée avec une particulière virulence. Il n'est sans doute pas de maire du massif forestier qui n'ait reçu la visite d'un ou de plusieurs opérateurs.
Cette offensive suscite des réactions. Elle se heurte à la crainte d'une atteinte au potentiel économique, culturel et environnemental d'un massif forestier déjà ravagé par les tempêtes. « Notre génération ne doit pas être responsable de la disparition de la forêt », souligne Henri Emmanuelli, président du Conseil général des Landes, qui plaide pour la mesure. Les représentants de l'État dans la région partagent cette vision relativement restrictive (voir ci-contre). Et, par ailleurs, les milieux environnementaux ne manquent pas d'aller vérifier si les futurs panneaux n'empiètent pas sur l'habitat du papillon fadet des laîches, ou s'ils ne nuisent pas aux herbiers à molinies, ferments de biodiversité.
Une manne de bienvenue
Sur le terrain, ces réserves ont souvent du mal à passer. Car la location de foncier aux opérateurs pour des loyers annuels tournant aux alentours de 2 500 euros l'hectare pour une durée de vingt ans, constitue une aubaine pour les propriétaires privés ou les communes, dont le patrimoine forestier, souvent très substantiel, a été plus ou moins ravagé par la tempête. « Nous avons certains de nos espaces forestiers qui sont terriblement fragilisés par les tempêtes », fait valoir Pierre Darmanté, maire d'Arjuzanx et président de l'Association des communes forestières landaises. « Notre projet photovoltaïque nous permettrait de compenser le manque à gagner causé par le sinistre et nous aiderait à financer le reboisement. La tempête nous a mis 8,5 millions d'euros par terre », constate pour sa part Jean-Marie Boudey, maire de la commune landaise Sore. « Le photovoltaïque va faire du bien à nos finances. »
Dans ce contexte rendu délicat par des impératifs contradictoires, la gestation des projets tient du parcours du combattant. Des avis de l'autorité environnementale départementale sont désormais nécessaires, au même titre qu'une enquête publique préalable avant l'obtention du permis de construire, qui suppose souvent la mise en conformité préalable des documents d'urbanisme. Et les candidats doivent en outre tenir compte des impératifs liés au réseau électrique. Certains des postes sources du réseau haute tension ont dû ou devront être renforcés pour faire face à un surcroît de puissance. Et quand les projets sont trop éloignés du réseau, il faut tirer des lignes. Autant d'opérations qui, partiellement financées par les opérateurs, alourdissent le budget et prennent du temps.
Or, aujourd'hui, le temps est précieux. Selon toute vraisemblance, le tarif de rachat du kilowattheure photovoltaïque, à ce jour très favorable, devrait être prochainement réduit. La rentabilité des projets pourrait s'en trouver compromise. Au grand jeu du solaire qui se joue dans notre région, il n'y aura sans doute pas que des gagnants.
 2 août 2010 07h21 | Par Bernard BROUSTET
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Energie solaire, la course contre la montre
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Un texte-cadre
Après avoir fixé des objectifs ambitieux en termes d'énergie renouvelable, l'État s'attache maintenant à canaliser le foisonnement de projets favorisé par les perspectives souvent juteuses du secteur.
En Aquitaine, les services de l'État ont publié une doctrine qui, tout en rappelant la législation dans le domaine, s'appuie sur le travail de la préfecture des Landes et des autres administrations publiques compétentes d'un département en proie à la ruée sur le soleil. Le « document de cadrage » régional insiste sur la nécessité de donner la priorité à l'équipement en panneaux photovoltaïques des toitures des bâtiments publics, industriels ou commerciaux, ainsi que l'utilisation de terrains déjà artificialisés (friches, décharges, etc.). L'État affirme aussi veiller à préserver la forêt et le potentiel agricole, tout en évitant le mitage du paysage, et l'installation des centrales dans des espaces à « enjeu environnemental identifié ». On saura d'ici quelques années si ces objectifs ont pu être atteints.
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