« Garder les usines »
« Les retours que nous avons sont effectivement très contrastés, confirme Serge Marcillaud, président de la CGPME Aquitaine. Nous ne disposons pas encore d'un bilan précis, mais nous avons l'impression que, globalement, les entreprises sont plutôt gagnantes. » Ce qui ne devrait pas constituer une surprise dans la mesure où c'était précisément le but recherché par le gouvernement.
Selon Christine Lagarde, la suppression de la TP devait alléger en moyenne de 22 % la cotisation des entreprises imposées, soit un gain de 6,3 milliards d'euros. Tous les secteurs d'activité étaient supposés sortir gagnants, à l'exception de l'énergie et des activités financières. L'allégement devait atteindre 32 % pour l'industrie, soit bien plus que la moyenne.
C'est au cours d'une intervention télévisée au mois de février 2009 que Nicolas Sarkozy avait annoncé la suppression de la taxe professionnelle en 2010. « Je veux garder des usines en France », s'était alors justifié le chef de l'État.
La taxe professionnelle, qui pesait essentiellement sur les investissements, était en effet considérée, de façon assez unanime, comme un impôt antiéconomique qui désavantageait l'industrie française. Si personne n'a donc vraiment pleuré la disparition d'un prélèvement qui avait fait l'objet d'une multitude de critiques depuis sa création, sa suppression posait tout de même deux problèmes. D'une part : par quoi la remplacer ? D'autre part : comment garantir aux collectivités territoriales de nouvelles ressources fiscales, puisque la TP représentait pour elles une importante source de revenus ?
Deux nouvelles taxes
L'ancienne TP a finalement été remplacée par un nouvel impôt baptisé « contribution économique territoriale ». Il se compose en fait de deux taxes : la cotisation foncière des entreprises (CFE) et la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE), auxquelles il faut encore ajouter les taxes votées et perçues par les chambres consulaires et une imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux (Ifer).
La cotisation foncière est assise sur la valeur locative des biens soumis à la taxe foncière. Elle est perçue par les communes et leurs groupements, qui votent les taux applicables chaque année. Pour la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, le taux est fixé au niveau national et varie en fonction du chiffre d'affaires réalisé.
La cotisation foncière est due au 15 décembre de l'année, ce qui explique que les chefs d'entreprise qui découvrent les sommes à payer réagissent ces jours-ci, comme le font notamment les auto-entrepreneurs (lire ci-dessous). Si les sommes exigées peuvent leur paraître aujourd'hui sans commune mesure avec leur chiffre d'affaires, les auto-entrepreneurs ne sont pourtant pas les principaux perdants de cette réforme.
« Elle ne change pas grand-chose pour les grosses entreprises, résume Bruno Jotrau, président de l'Ordre des experts-comptables d'Aquitaine. Les petites et moyennes entreprises sont souvent gagnantes. Mais ce n'est pas le cas pour toutes celles qui sont prestataires de services, avec des investissements relativement faibles et de fortes valeurs ajoutées. Pour elles, la CET peut être cinq ou six fois supérieure à la TP, voire davantage. »