Moins de banques
Comme ce maire basque, des milliers d'élus locaux sont sous le choc. Au récent congrès des maires à la Porte de Versailles, ils ne parlaient que de cela. Les banques sont de moins en moins nombreuses à répondre aux appels à financement des collectivités locales et ont de moins en moins d'argent à prêter. Rien de moins.
Pour un secteur public local qui finançait depuis des lustres, et en toute quiétude, une bonne part de ses investissements dans les crèches, les écoles, les gymnases ou les stations d'épuration par emprunt, le changement est rude. Les petites communes ne sont pas les seules concernées. La Ville de Bordeaux, une des meilleures signatures de la place, doit elle aussi batailler. Elle a bouclé son budget d'investissement 2011 grâce à un prêt de l'enveloppe exceptionnelle distribuée par la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
Elle qui n'avait que l'embarras du choix, parmi six ou sept banques chaque année, ferraille désormais avec deux ou trois banques : « C'est aujourd'hui plus difficile et plus cher. Et les clauses des banques sont plus dures », explique-t-on à la Ville de Bordeaux. Idem au Conseil général de la Gironde, une collectivité à la gestion financière pourtant réputée prudente. Un appel d'offres de 55 millions d'euros lancé auprès d'une dizaine d'établissements financiers s'est soldé par une seule proposition, sur 10 % de la somme. « Il y a deux ans, nous recevions les banquiers et faisions jouer la concurrence pour obtenir les meilleurs taux. Aujourd'hui, c'est nous qui nous déplaçons chez eux », résume Gérard Marty, le directeur général des services du Conseil général de la Gironde.
Inutile de parler des taux. En dix-huit mois, ils ont pris au moins 2 points, pour culminer aujourd'hui bien au-delà de 4 %, commission bancaire, à la hausse, comprise. La situation est telle que les élus communistes s'inquiètent pour les moyens financiers à venir des collectivités.
Effondrement de Dexia
La première explication à la fermeture progressive du robinet à crédit pour les maires est l'effondrement de la banque Dexia, démantelée au mois d'octobre. Ses 77 milliards d'euros d'encours de crédit, parfois toxiques, ont été repris par Dexma, une société de titrisation où la CDC jouera, aux côtés de l'État, les bouches trous. Dexia occupait 40 % du marché des collectivités locales. Sa quasi-disparition laisse un gros vide.
Les banques étrangères, allemandes ou écossaises, qui avaient pris goût au marché public local français, ont elles aussi disparu du radar. « On ne voit plus guère les banques généralistes, comme la BNP ou la Société générale, qui ont apparemment d'autres urgences à traiter sur le front des dettes souveraines », affirme Philippe Laurent, maire de Sceaux (92) et président de la commission finances de l'Association des maires de France. Restent les banques mutualistes (Crédit agricole, Caisse d'épargne, Crédit mutuel), aujourd'hui lestées par les nouvelles réglementations bancaires. La crise de la dette a donc provoqué une nouvelle onde de choc sur le secteur public local.
Les solutions
Pour y remédier, le gouvernement a demandé à la CDC de débloquer 3 milliards d'euros sur les fonds d'épargne, dont la moitié est gérée par elle en région. « Nous avions 52 millions d'euros à distribuer et plus de 200 millions de demandes », indique Xavier Roland-Billecart, son patron à Bordeaux. Au congrès des maires, François Fillon a dit qu'une rallonge de 2 milliards pourrait être dégagée. Elle ne sera pas de trop pour financer les budgets d'investissements. La banque publique locale, associant la CDC et la Banque postale, est aussi attendue. « Mais l'enthousiasme des futurs actionnaires est modéré », relève Philippe Laurent.
Au Pays basque, Jean-Pierre Harriet est inquiet pour 2012. Il va étaler dans le temps ses investissements et resserrer ses dépenses de fonctionnement - c'est-à-dire les dépenses de personnel et les subventions. Il ne sera pas le seul. Les budgets publics locaux qui s'élaborent seront marqués du sceau de l'austérité. Faute de crédits.
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